Rose, de Botticelli à Christo

Le Rose est à l'honneur un peu partout ce mois ci et cette fois je vous propose de l'examiner à travers le prisme de l'Art... Le livre dont je vous parle nous raconte bien plus que cinquante nuances de rose. Il nous initie au vocabulaire des camaïeux, aux significations convenues et à celles qui le sont moins, il rend évidentes les subtilités de cette couleur pas si naïve, pas si mièvre... Je vous dis pourquoi j'adore cet ouvrage, et aussi cette collection...

1. Le livre s'ouvre sur un foisonnement d'informations sur la couleur rose

Des zooms sur des oeuvres, une chronologie de son utilisation, des repères géographiques nous plongent dans cette couleur et très vite on découvre qu'alors qu'on la pensait "mineure", quelque part entre le rouge et le blanc, elle est en fait une couleur à part entière, avec ses codes, ses symboles forts.

Les premières images, ci dessus, sont des extraits d'oeuvres décrites un peu plus loin dans le livre, un peu comme des teasings. J'aime bien m'amuser à rechercher à quelles oeuvres ces extraits appartiennent, au fil de la lecture. Ici il s'agit de "From Pink Shell" de Georgia O'Keeffe (1931), à gauche, et du "Peigne" de Kushi (1795 1796), à droite...

• Dans ce chapitre qui rassemble tout ce qu'il faut savoir sur le rose, on découvre la chronologie de sa découverte (il est décrit dès la littérature antique), ses symboles et contre symboles à travers les siècles. C'est par exemple pour répondre à l'absurdité du rose attribué aux petites filles à tout cran au début du XXème siècle que le pop art et l'art conceptuel le dénoncent.
• Mais c'est aussi autour de la garde robe de Marie Antoinette qu'on s'amuse à décrire les nuances des étoffes via des noms frivoles comme "cuisse de puce", "ventre de puce" et bien d'autres pour nommer les couleurs à mi chemin entre le gris, le brun et le rose...
• Lorsqu'on étire le rose vers le corail, l'orangé, le violet, le beige, il devient l'outil pour exprimer les ressentis, les impressions énigmatiques, il aide à exprimer l'indicible...
• Je me suis régalée à découvrir toutes ces nuances entre "rose Pompadour" (premières porcelaines de la manufacture de Sèvres, 1757), "cuisse de nymphe émue" (avec le modiste Beaulard en 1775), le "rose Mountbatten" (camouflage des navires de la Royal Navy, 1940)...

• Ce que j'adore dans cette collection d'ouvrage c'est que chaque livre explore le sujet à fond. Pas de (couleur) rose sans évoquer les "roses" (fleurs) de redouté (1817) ! Il est aussi question de "The word's pinkest pink" de Kapoor en 2016, ou du double de Marcel Duchamps, Rrose Sélavy en 1922...
• Une magnifique carte (blanche et rose) nous donne des repères géographiques des sites "roses" depuis la Valée des Roses au Maroc à Jaipur, en Inde, en passant par  Petra (Cité rose, Jordanie) ou le Lac Hillier (Australie)
• Ce livre est un formidable tremplin d'informations et de pistes à suivre, de nombreuses fois j'ai ouvert des mots clés découverts au fil des pages, qui m'ont permis d'entrer dans des mondes que je ne connaissais pas (le Rose Mountbatten dont je vous ai parlé plus haut par exemple)...

Parce que je peins, le dossier sur la Gamme Chromatique intitulé "Nommer le rose" me semble capital.

• On y retrouve des nuances de rose avec leur teinte, leur description et les tableaux reproduits dans le livre où les retrouver en situation
• J'ai aimé l'extrait du Répertoire des couleurs d'horticulteurs (Rose Lilacé, Rose Hermosa...)

Les références historiques et littéraires font toute la richesse de ce répertoire

• Le livre est ponctué de citations
• Les références à l'Histoire et la petite histoire nous montrent combien cette couleur est importante...

2. Le chapitre Les Incontournables

• Ici 20 oeuvres sont présentées méthodiquement et avec subtilité avec pour chacune la même trame : une photo en pleine page et en regard tout ce qu'il faut savoir : l'auteur, la date, le lieu où se trouve l'oeuvre, sa création, sa signification, sa place dans l'art à l'époque de sa création et maintenant, les références qui s'y rapporte. Des encarts font des zooms sur des facettes de l'oeuvre.
• J'ai adoré particulièrement Le Peigne, de Kushi, Les Hasards Heureux de Fragonard, L'Ambitieuse, de Tissot (expo récente au Musée d'Orsay), Saint Jean l'Evangéliste par El Greco...

J'ai été surprise par le Portrait d'Henri IV en Mars par Jacob Bunel (1605) où le rose est à la fois triomphateur et diplomate, tout cela est très bien expliqué... et par la performance de Christo qui a emballé les iles de la baie de Miami en 1980...

3. Le chapitre Les Inattendus

• Là aussi, une vingtaine d'oeuvres sont présentées et expliquées selon les codes de cettes collection décrits plus haut
• Parmi mes préférées : la Femme au Collier (portraits du Fayoum, je me souviens d'une exposition sur le sujet au Louvre il y a longtemps, j'étais gamine et leur beauté m'avais ravie), le vase à décors de rubans (manufacture de Sèvres), le Domino rose (de John Humphreys Johnson, 1895) ou Marie, reine d'Ecosse par François Clouet (vers 1558)...

En conclusion je suis fan absolue de cette collection des Éditions du Chêne, qui, sous l'appellation "Ça c'est de l'art" offre des focus sur des couleurs en 40 notices, pour créer au fil des parutions un nuancier érudit, vif et addictif, qu'on lit avec plaisir.

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Rose, de Botticelli à Christo
Une couleur à (re)découvrir en 40 notices
Hayley Edwards Dujardin
108 pages
17,5 cm x 25 cm
ISBN 9 782812 320989
Septembre 2021
Editions du Chêne

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