Femmes Peintres par Sandrine Andrews
L'exposition Femme Peintres se tenait au Musée du Luxembourg jusqu'à la fin du mois de juillet. Si vous l'avez laissée passer vous pouvez encore la voir en ligne sur le site du Musée jusque fin août. Ou vous plonger tranquillement dans le très beau livre de Sandrine Andrews et ce sans limite dans le temps...
C'est ce que je vous propose de faire pour se régaler d'un sujet qui a marqué et enrichi le monde de l'art, celui de la place des femmes peintres reconnues officiellement...
Au Sommaire :
- Un siècle de femmes
- Les chefs d'oeuvre
- Glossaire
- Index
Des femmes font reconnaître leur talent dans un monde d'hommes...
Elles ont ouvert la voie aux plus belles innovations artistiques, en faisant preuve de modernité et d'audace... Entre 1780 et 1830 les femmes peintres ont su faire reconnaitre leur talent. On connait très bien Elisabeth Vigée Le Brun, cet ouvrage nous fait découvrir son oeuvre et celle toutes les autres femmes peintres de ce tournant artistique majeur...
1. La première partie du livre "Un siècle de femmes"
Droit à la formation, professionnalisation, existence publique et place sur le marché de l'art : les femmes peintres de ce siècle, proches du pouvoir, en quête d'indépendance, ont marqué le Siècle des Lumières.
Pourtant leur place n'a pas été reconnue d'emblée, soit parce que leur oeuvre a été confondue avec celle d'un peintre plus renommé dont le nom faisait monter les prix dans les salles de ventes, ou parce que les critiques d'art étaient majoritairement masculins dans un monde où les femmes n'avaient pas leur place...
L'Académie Royale, créée en 1648, qui fondait les règles de l'art, définissait le bon goût et organisait la formation des jeunes artistes français qui travaillaient à la représentation de la gloire du Roi n'était pas franchement fermée aux femmes. Mais y entrer était un privilège très cadré, qui nécessitait des appuis. Il fallait aussi répondre à des dogmes du style académique, qui par exemple hiérarchisait les thématiques. L'allégorie était au sommet des représentations honorées, puis la peinture d'histoire, suivie du portrait, et venaient seulement derrière les genres "mineurs" comme la peinture de paysage, la nature morte...
Les femmes ne peuvent y enseigner et ne peuvent pas non plus suivre le même enseignement que les hommes. Les cours de dessins d'après modèles d'hommes nus leurs sont fermés.
Catherine Duchemin, épouse du sculpteur Girardon est la première femme à entrer à l'Académie. Mais sa carrière a été effacée car elle a élevé dix enfants tandis que son époux répondait à de nombreuses commandes pour le Château de Versailles. Et c'est là aussi une des raisons de la timide place des femmes dans l'art : elles doivent concilier leur rôle de mère, d'épouse avec leur vie d'artiste.
Le livre expose les différentes étapes de la progression des carrières d'artistes femmes dans ce contexte masculin. Marguerite Gérard, Constance Mayer, Marguerite Labille Giraud font reconnaître leurs talents et on découvre leurs stratégies...
Avec notamment la deuxième Académie, l'Académie Saint Luc (du nom du saint patron des peintres), dont l'existence est attestée depuis le XVème siècle, et qui ouvre elle aussi des voies, notamment à Élisabeth Vigée Le Brun, portraitiste de Marie Antoinette, ou Adélaïde Labille Guiard.
Et surtout un article très élogieux de L'Année Littéraire fait date, en reconnaissant le talent des portraitistes "Jamais ce genre n'a été porté en France à un plus haut degré de perfection, et je dois ajouter à la gloire d'un sexe enchanteur , auquel on ne rend peut être pas assez justice dans les sciences, dans les lettres et dans les arts, que c'est à deux femmes qu'on doit cette révolution".
Des textes passionnants, menés un peu comme une enquête, des illustrations très nombreuses, magnifiquement choisies et reproduites avec une grande qualité, sur papier glacé, en pleine page ou en illustrations, font de cet ouvrage un merveilleux livre qui oscille entre culture G, passion féminine touchante et belle, optimisme et ferveur.
On découvre le cheminement des premiers ateliers de femmes peintres, comme celui de Jean Baptiste Greuze, de Jacques Louis David, d'Adélaïde Labille Guiard, et le rôle de la Révolution et de la toute nouvelle Société populaire et républicaine des arts dans cette avancée de l'Histoire.
Ce livre dense et foisonnant m'a fait découvrir beaucoup de femmes peintres aux oeuvres magnifiques comme l'autoportrait ci dessous,qui a été un tremplin de recherches pour en découvrir davantage... Ne trouvez vous pas ce tableau fascinant avec ce jeu de regards en trio, ces plissés, cette légèreté délicieuse, jusqu'au prénom de l'artiste ?
Puis les femmes résistent...
Les femmes résistent malgré le Code Napoléon qui les place sous la tutelle des hommes, qu'ils soient père, frère ou époux... Elles n'ont plus besoin de travailler et leur activité tient au plaisir et à l'agrément et lorsqu'elles exposent au Salon en 1804 elles sont quatorze fois plus nombreuses qu'en 1789 !
Marie Denise Villiers, Marie Joséphine Charlottede Val d'Ognes, 1801, New York, Metropolitan Museum of Art
2. La seconde partie du livre est consacrée aux chefs d'oeuvres
Sandrine Andrews combine des thématiques d'approche et les descriptions de tableaux magnifiques, pour beaucoup en double ou pleine page.
Pauline Auzou dessine pour un magazine féminin, Le journal des dames et des modes, qui défend l'émancipation de la femme...
Ce livre, qui zoome sur les talents féminins à une période clef de l'histoire de l'art n'est pas féministe à outrance. Il est au contraire une très agréable rencontre d'un siècle où la peinture est un des reflets de la société.
J'aime ce livre pour
- Sa beauté, son papier glacé, son juste dosage des textes et des reproductions d'art, la qualité des photos
- Son originalité, qui est le reflet de l'exposition du Musée du Luxembourg
- Son côté petit bijou de bibliothèque, à laisser à protée de main et à partager pour les magnifiques découvertes qu'on y fait de ces femmes peintres talentueuses aux oeuvres si touchantes
Femmes Peintres
Sandrine Andrews
20 cm x 24,5 cm
106 pages
Mars 2021
ISBN 9 782036 002937
12,90 €
Editions Larousse