Festival International des Jardins de Chaumont sur Loire 2020
Le Festival International des Jardins se tient en ce moment au Domaine de Chaumont sur Loire et jusqu'au 1er novembre... Une jolie perspective pour prolonger la saison. Et pour se régaler de la créativité des meilleurs paysagistes qui installent 25 jardins éphémères, qui tous nous délivrent un message de connexion à la Terre. C'est l'occasion de se laisser conter des histoires de verdure en se laissant porter par les ambiances de ces "chambres vertes" et aussi de glaner une foule d'idées pour aménager nos propres jardins. Tout cela ne représente qu'une infime partie de tout ce qui est à voir au Domaine de Chaumont, château somptueux, avec une vue merveilleuse sur la Loire, parc historique et jardins permanents, exposition d'art, potager, serre...
Je vais vous partager mes impressions, sur plusieurs posts. Et j'espère vous communiquer mon enthousiasme, j'ai été absolument enchantée de cette découverte magnifique et foisonnante.
Détails d'importance et d'actualité : les mesures sanitaires sont parfaitement pensées, avec notamment un sens de visite, il n'y a qu'à se laisser guider par un fléchage discret pour absolument tout voir, sans croisements de visiteurs...
Le principe du Festival des Jardins de Chaumont
Le Domaine de Chaumont sur Loire accueille le Festival international des Jardins depuis 1992. Dans une partie du Domaine, 25 équipes de paysagistes, venus de France bien sûr, mais aussi d'Italie, de Suède, d'Irlande, du Brésil, d'Inde... et élus par un jury proposent leur vision des "Jardins de la Terre - Retour à la Terre Mère", qui est la thématique de cette 29ème édition.
Une Thématique sensible et qui nous parle
Il est patent pour tous maintenant que nous traversons une période historique. Et nous avons tous été bouleversés depuis le début d'année en (re)découvrant combien notre lien à la Nature est vital, essentiel. La thématique du Retour à la Terre Mère, dans le concret de ce Salon a parlé à tous, moi la première. J'ai été touchée par la pertinence et la justesse, la beauté des jardins créés.
Des espaces parfaitement orchestrés
Chaque "chambre verte" est délimitée de hautes plantations. Du coup elles se présentent toutes comme une scène unique, comme un cocon, dans laquelle on suit un parcours en découvrant au fur et à mesure une mise en scène de jardin. Souvent on ne voit pas tout d'emblée, il faut "entrer" dans cet espace pour progressivement comprendre le message délivré par la mise en scène de la plantes et d'installations (terrasses, jets d'eau, jeux de perspectives, de couleurs, la créativité des artistes paysagistes est immense). Et pour accompagner notre réflexion ou nourrir notre curiosité, un texte explicatif, à l'entrée, offre une clef de lecture de ce qu'on vient de voir.
Une scénographie inspirante
Du coup une réflexion, plus ou moins vaste, accompagne notre découverte. J'ai remarqué les réflexions jubilatoires des enfants, qui saisissent parfaitement le côté ludique de cette exposition. Et les regards échangés avec d'autres visiteurs partageaient le plaisir d'avoir vu cela. J'y ai trouvé des idées que j'appliquerai dans mon propre jardin, et surtout j'y ai trouvé l'immense plaisir de me laisser porter par les mises en scène que je découvrais. Je vous en partage quelques unes...
Rainforest
Juste à l'entrée de l'exposition, dans la serre, se trouve "Rainforest", de Patrick Nadeau. De drôles de dômes parapluies tissés jouent avec la lumière. Ce sont des architectures de Tillandsias, ces plantes épiphytes qui sont capables d'absorber directement dans l'air les éléments qui leurs sont vitaux. Les coupoles mi organiques sont élégantes, presque irréelles, et contrastent avec la végétation tropicale, massive, envahissante, luxuriante de la serre. Pas vraiment blanches mais plutôt vert de gris, elles contrastent avec le vert sombre de la végétation ambiante et jouent avec la lumire, l'effet offre une idée d'équilibre étrange mais serein...
Agapè
Pierre Alexandre Risser (France)
Agapè ouvre le festival mais tient une place particulière. Agapè, c'est le Jardin d'Amour, créé par Pierre Alexandre Risser (dont j'adore les créations, toujours enchanteresses). C'est un jardin pérenne, carte verte, ou plutôt carte blanche lui a été donnée au titre d'invité.
En grec, Agapè désigne l’amour divin et inconditionnel. D’Homère à Khalil Gibran, de l’orée de l’Humanité à nos jours, l’amour est une préoccupation constante des êtres. Il se présente dans leur sommeil ou brûle en eux tel un feu sacré. Il se vit dans l’apaisement ou la fureur. Ce jardin invite le visiteur à voyager entre ses rives multiples, douces ou passionnées. Dans l’écrin végétal de l’amour, les feuillages, en frissonnant, éveillent les sens, car l’amour, selon Platon, revêt aussi une forme physique : "Éros". L’amour de l’esprit de l’autre est la troisième et dernière forme que reconnaît le philosophe : "Philia". En cheminant dans ce jardin, une prière pour le bien-aimé naîtra peut-être sur les lèvres des amoureux... Le Paradis serait un amour désintéressé, une ode à l'amour pour l’amour !
Au détour du chemin, son existence n’avait jamais semblé autant palpable. Fantasme des hommes depuis l’orée de l’humanité, le jardin originel dégageait une puissante sensation d’harmonie et d’équilibre.
Une mer de verdure, changeante et surprenante. Mille fois représenté, le paradis céleste imposait son message universel : l’amour. Mais comme l’avaient pensé les Grecs anciens, l’amour sous toutes ces facettes… Charis, la gratitude, eunoia, le dévouement, storgè, la tendresse, philia, l’amitié, mania pathè, la passion, pathos, l’amour possessif, porneia, l’appétit insatiable, et puis harmonia, eros et agapè, l’amour inconditionnel. À chaque pas, les végétaux bruissant de vie semblaient crier aux hommes le sens de la vie : « Aimez ! Aimez d’amour et d’amitié, délectez-vous des plaisirs de l’amour spirituel et physique, vivez passionnément et tendrement, osez exprimer votre gratitude, apprenez le dévouement, aimez sans compter ! ». Au fil de la promenade dans ce jardin d’Eden, l’envie de cheminer avec l’Être aimé grandissait en chacun, pour partir ensemble à la découverte de tous les paysages de l’amour terrestre. L’ultime message de la nature aux hommes sera-t-il enfin écouté ?
On récolte ce que l'on sème, Baptiste Gérard Hirne, Festival International des Jardins de Chaumont sur Loire
On récolte ce que l'on sème Baptiste Gérard Hirne, Emma Morillon, Philippe Allignet, Festival International des Jardins de Chaumont sur Loire
On récolte ce que l'on sème Baptiste Gérard Hirne, Emma Morillon, Philippe Allignet, Festival International des Jardins de Chaumont sur Loire
On récolte ce que l'on sème
Baptiste Gérard Hirne, Emma Morillon, Philippe Allignet (France)
Ilot végétal luxuriant, ce jardin niché au coeur d'espaces de monoculture, grâce à des bâtons de vie, promet à l'homme un avenir meilleur, au son des abeilles et des oiseaux.
Dans cet espace, l’agriculture s’oppose d’abord à la nature sauvage, avant de rencontrer une forme de réconciliation. Les surfaces cultivées à grande échelle sont bien souvent consacrées à une seule espèce végétale, tandis que la nature dispose d’une palette d’essences utiles et nourricières très diversifiée. Les premiers sont matérialisés par des sillons creusés dans une terre nue, la seconde se compose de saule tressé vivant accroché par des plantes grimpantes. Pourtant, dans un troisième temps, les formes et les couleurs s’uniront pour proposer différents biotopes aux lumières et parfums volatils... Dans des vasques, des bâtons de vie à l’écorce rouge remplis de graines invitent à semer à son tour parmi les arbres, arbustes et vivaces environnants. Indomptée, la nature reste luxuriante, bourdonnant du son de ses abeilles et de ses oiseaux. Chaque graine est un cadeau à venir pour l’homme. Châtaigniers, saules, ails, courges, sureaux s’entremêlent bientôt aux céréales. La terre reprend vie. Les champs prospèrent à nouveau
Solstice
Nicholas Tolman (France, Etats Unis)
La nature reproduit des cycles mystérieux depuis la nuit des temps. Afin de poursuivre notre évolution en harmonie avec elle, nous devons comprendre comment ils étaient observés et interprétés dans les temps anciens. Considéré comme le nombril du monde dans la Grèce Antique, l’oracle de Delphes est ainsi convoqué. Il était notamment dédié à Gaïa, déesse mère de tous les dieux, déesse terre, et terre elle-même. Un mur en ruine circulaire rappelle les vestiges de ce site mythique où les dieux répondaient justement aux questions délicates concernant le futur. Suivant un tracé imaginaire entre le solstice d’hiver et le solstice d’été, une rigole traverse le jardin comme une ligne de vie, de la naissance bouillonnante au retour sous la terre. Entre les pierres effondrées, une ouverture en demi-cercle permet au visiteur de s’avancer. Dans ce lieu sacré, le végétal a recouvert le sol et les restes de l’édifice : jeunes bouleaux et graminées, parmi d’autres espèces pionnières, mousses et plantes de terrains vagues, de bas-côté, de voies de chemin de fer et d’autres espaces sans jardiniers, arbres et vivaces ornementales… La Terre Mère semble avoir elle-même replanté son jardin. Il y a une certaine logique dans cette conception d’un écosystème qui, avec le temps, retrouve son indépendance. Le résultat est un paysage naturel verdoyant et coloré.
Hortus Vitae Giuliana Gatti, Giulia Calzetti, Anna Patrucco , Festival International des Jardins de Chaumont sur Loire
Hortus Vitae Giuliana Gatti, Giulia Calzetti, Anna Patrucco, Festival International des Jardins de Chaumont sur Loire
Hortus Vitae
Giuliana Gatti, Giulia Calzetti, Anna Patrucco (Italie)
L’œuf représente la perfection de la nature et son harmonie. À l’origine de tout être vivant, il symbolise la fertilité. Un potager d’ornement inhabituel en prend ici la forme. Il se démarque nettement des potagers traditionnels : les plantes ornementales se mêlent aux plantes productives, nourrissant le corps et l’esprit, créant ainsi un jardin “impressionniste”, un royaume de mélanges, plein de couleurs et de parfums. De l’autre côté du chemin qui parcourt l’espace, s’étire un jardin sauvage, conçu comme une prairie fleurie. Le potager ornemental et le jardin sauvage sont deux aspects différents de la Terre Mère, ayant néanmoins en commun la variété et le mélange des espèces. Ils démontrent une coexistence harmonieuse et équilibrée. Le choix des plantes manifeste plus qu’un intérêt esthétique, il procède d’une vision durable et écologique, et vise à valoriser la biodiversité. La présence d’une pergola et d’animaux, tous de saule tressé, tient lieu de trait d’union entre le visiteur et le monde végétal. Déambuler entre eux devient une expérience à la fois sensorielle, immersive et éducative, qui incite à repenser la relation entre l’homme et la nature et ouvre de nouveaux horizons - à l’origine d’une renaissance potentielle.
La Planète Fleurie Sau Yin Wong, Pak Chuen Chan, Festival International des Jardins de Chaumont sur Loire
La Planète Fleurie
Sau Yin Wong, Pak Chuen Chan (Hong Kong, Chine)
L’expérience inédite et solitaire d’une planète existe, représentée par sa forme minimale : une sphère parfaite. Un jardin de fleurs orphelin s’y est enraciné. Adossée contre le volume de la sphère, une échelle individuelle permet de grimper à son sommet et d’embrasser le jardin d’un seul coup d’œil. La matérialisation de cette planète fait référence au rocher des savants qui appartient à la longue tradition des jardins orientaux. D’aspect irrégulier, celui-ci entre en résonnance avec les nuages dans le ciel. La sphère parfaite en propose une version contemporaine. Elle conserve cependant sa texture rugueuse, qui contraste avec la géométrie de l’ensemble. L’interaction avec les fleurs demeure toute personnelle. La beauté, changeante par nature, s’apprécie dans la solitude et la sérénité. À l’entrée du jardin, le craquement des graviers sous les pas marque le début de l’aventure. Il est question d’entamer un dialogue entre moelleux et solide, tangible et intangible, entre éphémère et immortalité.
Terre Marché Jennyfer Bruhier, Marie Cheron, Cécile Ambert, Nicolas Leveque, Festival International des Jardins de Chaumont sur Loire
Terre Marché Jennyfer Bruhier, Marie Cheron, Cécile Ambert, Nicolas Leveque, Festival International des Jardins de Chaumont sur Loire
Terre Marché
Jennyfer Bruhier, Marie Cheron, Cécile Ambert, Nicolas Leveque (France)
À partir du moment où l’homme a décrété qu’il se situait entre les Dieux et la Terre, il a pu s’affranchir du respect vis-à-vis de cette dernière. Fort de sa supposée intelligence, il a puisé sans relâche au cours de quelques siècles, et presque épuisé, les ressources que la Terre a mis des millions d’années à produire. L’homme consomme la Terre en libre-service. Source de richesses, elle nourrit les hommes, les habille, les soigne, les protège. Ils s’y promènent comme dans un supermarché. Ce jardin prône la consommation éclairée, afin de renouer avec la Terre. En le parcourant, nous sommes saisis par son labeur et tout ce qu’elle mobilise pour engendrer ce dont nous avons besoin. Dans une boutique atypique, nous découvrons des rayons d’alimentation, de parapharmacie ou de prêt-à-porter où les “produits” se trouvent sous leur forme originelle. Dans un pot évoquant la boîte de pop-corn, la plantule de maïs et celle de la betterave à sucre rappellent ainsi les ingrédients nécessaires à la confection de cette confiserie. En questionnant nos habitudes, nous retrouvons le sens de notre lien à la Terre.
Le Jardin du goût Chantal Colleu Dumond, Bernard Chapuis, Festival International des Jardins de Chaumont sur Loire
Le Jardin du goût
Chantal Colleu Dumond, Bernard Chapuis (France)
Imaginez une table pantagruélique et circulaire aux allures de soucoupe volante, dressée et prête à recevoir les gourmands, envahie de vignes et de plantes exclusivement comestibles... Des cascades de capucines offertes, des parfums qui se répandent dès que l'on frôle les plantes...Elle assied le lien entre produits de la terre et festin alimentaire. Interrompant un banquet grandiose, la nature s’invite sur la table. Les légumes sortent des assiettes et se faufilent entre les couverts. Le Jardin du Goût invite le visiteur à s’interroger sur son rapport à la nature, lui rappelant qu’il tire avant tout sa subsistance de la terre : terre mère et nourricière.
Le Jardin Mandala Chantal Colleu Dumond, Bernard Chapuis, Festival International des Jardins de Chaumont sur Loire
Le Jardin Mandala
Chantal Colleu Dumond, Bernard Chapuis (France)
De forme circulaire ce jardin en permaculture est orienté vers les quatre points cardinaux, qui représentent les quatre éléments (l’Air, la Terre, l’Eau et le Feu). La culture sur buttes, préconisée pour le jardin mandala, permet de planter une plus grande quantité ou diversité de plantes sur une même surface, d’augmenter la productivité, d’aérer le sol, de drainer les excès d’eau et d’avoir une exposition perpendiculaire au soleil. Le jardin mandala permet de mieux se relier à soi-même et à l’univers.
Souvenirs Alexandra Von Bieler, Roberto Rao, Thomas Kreuder, Festival International des Jardins de Chaumont sur Loire
Souvenirs
Alexandra Von Bieler, Roberto Rao, Thomas Kreuder (Allemagne)
Terre Mère : voici comment nous, êtres humains, appelons affectueusement la planète sur laquelle nous vivons. La Terre Mère donne la vie, mais elle la reprend également selon un cycle infini. Les humains dépendent de la planète Terre. Sans elle, nous n’existerions pas. La Terre Mère procure à tout organisme logis, nourriture, protection, ainsi que des biens culturels et spirituels. Il y a des millions d’années, les êtres humains vivaient en équilibre avec les systèmes naturels. Dans des temps plus récents, que l’on nomme l’Anthropocène, ils ont altéré la plupart de ces systèmes, processus et même organismes. Souvenirs et mémoires de la Terre Mère sont inscrits profondément dans la psyché humaine et nous influencent dans nos vies de tous les jours. Relier la planète Terre au concept maternel de Terre Mère, faisant preuve d’un amour inconditionnel, étend les fonctions écosystémiques d’une planète physique à un contexte spirituel décrit par les civilisations les plus anciennes. Une représentation idéale et naturelle de la Terre Mère est ici confrontée à un environnement gravement perturbé.
La Petite Serre, Jardin pérenne
Cette serre à la silhouette graphique met en scène une magnifique collection de plantes tropicales habitée de libellules, de grenouilles et autres bonheurs de vie...
Il ne s'agit pas là d'un inventaire exhaustif, mais de mes préférences, enfin si je peux en énoncer car absolument TOUT m'a enchantée...
A vous de vous rendre à Chaumont sur Loire et vous laisser séduire par le Festival International des Jardins...
Ce festival est pour
- Les amoureux de Nature
- Les aimants des Jardins
- Tous ceux qui cherchent une jolie visite en Val de Loire (prévoir la journée entière car le lieu est très vaste
- Les créatifs
- Les peintres qui trouveront là une inspiration certaine
- Les étudiants en paysagisme
- Ceux qui sont dans la mouvance de se reconnecter à la Terre
- Les philosophes
- Les chercheurs de Good Vibes